Bientôt les élections municipales à Genève : comment voter efficacement, mode d’emploi

Les règles

Dans le système proportionnel en vigueur à Genève, chaque personne ayant le droit de vote dispose de deux types de suffrages : les suffrages de liste et les suffrages individuels (nominatifs).

Chaque électeur ou électrice dispose d’abord d’un nombre de suffrages de liste égal au nombre de sièges à pourvoir. Cela représente, par exemple, 80 suffrages en Ville de Genève, 37 à Vernier et 15 à Gy.

Pour utiliser pleinement ses suffrages de liste, il est important de choisir un bulletin de parti ou d’indiquer sur le bulletin officiel (celui qui ne comporte ni de nom de liste, ni de noms de personnes candidates) un titre ou un numéro de liste. En agissant ainsi, l’électeur ou l’électrice s’assure que tous ses suffrages de liste compteront. Ils seront attribués à la liste choisie, sous réserve des panachages expliqués plus loin.

Chaque titulaire des droits politiques dispose en outre d’autant de suffrages individuels qu’il y a de sièges à pourvoir. Mais il n’est possible de voter qu’une fois pour une candidature déterminée. Pour les élections municipales, contrairement aux élections fédérales, le cumul n’est pas possible.

Ayant choisi une liste, l’électrice ou l’électeur peut déterminer, sur cette liste, à qui elle ou il entend accorder un suffrage individuel. En votant « compact », donc en ne modifiant rien à la liste choisie, on renonce à effectuer un choix entre les personnes figurant sur cette liste. Sauf s’il s’agit d’une abstention parfaitement consciente et décidée, il est dommage de se priver de cette possibilité.

Il est d’abord possible de biffer des noms sur la liste pour ne laisser subsister que ceux des personnes dont on préfère l’élection. En jargon genevois, cette façon de faire s’appelle le latoisage. Le même résultat peut être obtenu en prenant un bulletin officiel, en y ajoutant le titre ou le numéro d’une liste, ainsi que le nom des personnes de cette liste que l’on préfère voir élues. Dans les deux cas, cela ne change rien à la distribution des suffrages de liste. La liste choisie obtiendra tous les suffrages de liste de la personne qui vote ainsi, même si seuls quelques noms subsistent sur le bulletin de vote. Si Alceste choisit, en Ville de Genève, la liste n° 1 et biffe tout le monde sauf 3 personnes qu’il apprécie particulièrement, il donne néanmoins 80 suffrages de liste à la liste n° 1. 

Mais il est possible d’aller plus loin. Un électeur ou une électrice peut, après avoir choisi une liste déterminée, y ajouter les noms de personnes figurant sur une autre liste. C’est ce que l’on appelle le panachage. Celui ou celle qui agit ainsi « cède » à la liste à laquelle appartiennent les personnes ajoutées autant de suffrages de liste que de noms ajoutés. Si, par exemple, Célimène choisit la liste n° 2 en Ville de Genève et y ajoute trois noms de la liste n° 7 et deux noms de la liste n° 8, elle donne 75 suffrages de liste à la liste n° 2, 3 suffrages à la liste n° 7 et 2 suffrages à la liste n° 8.

Cette opération est intéressante, car elle permet, en rabotant un tout petit peu son choix de liste, de donner un coup de pouce souvent décisif à des candidatures appréciées figurant sur d’autres listes. Il faut souligner que beaucoup de gens votent encore compact : le poids des suffrages individuels panachés est donc proportionnellement plus important. En outre, le classement des candidatures sur une liste se joue souvent à quelques voix près. Le panachage peut donc être décisif pour le succès d’une candidature.

 

Quelques conseils pour voter efficacement

En partant des règles qui viennent d’être exposées, on peut formuler quelques conseils pour maximiser l’efficacité de chaque vote.

Premièrement, rappelons qu’il est important de choisir une liste, soit en utilisant un bulletin de parti pré-imprimé, soit en indiquant sur le bulletin officiel un nom ou un numéro de liste. De cette manière, on évite de perdre des suffrages de liste.

Deuxièmement, il ne faut pas se priver de trier parmi les candidatures de la liste choisie. Pour ce faire, il y a deux stratégies principales. 

Si l’on tient à l’élection d’une ou quelques personnes de la liste, il faut impitoyablement biffer toutes les autres, même si l’on n’a rien contre celles-ci. Il ne s’agit pas de punir les autres candidatures, mais de marquer sa préférence pour celle ou celles auxquelles on tient particulièrement.

A l’inverse, si l’on veut absolument éviter l’élection d’une ou de quelques personnes déterminées, il faut non seulement les biffer sur la liste, mais laisser subsister un maximum de  candidatures non biffées pour les favoriser par rapport à celles que l’on tient à écarter.

Lors de l’élection à venir en Ville de Genève, cette logique individuelle sera peut-être complétée, pour deux listes, par une logique de parti. En effet, les listes « Le Centre – Les Vert’libéraux » et «  Ensemble à gauche et Union populaire » réunissent chacune les candidatures de deux organisations politiques différentes. Il sera intéressant, dans les deux cas, de voir si les électeurs et électrices proches de chacune des deux tendances réunies par convenance électorale suivent une logique partisane ou s’en tiennent à une évaluation individuelle des candidatures. Dans le premier cas, si ces listes obtiennent le quorum, il n’est pas impossible que l’une des tendances « unies » obtienne bien plus de sièges que l’autre.

Troisièmement, il est intéressant de panacher. Cela ne coûte que quelques suffrages de liste sur 80 et permet d’influencer la composition des groupes politiques issus de listes pour lesquelles on n’a pas voté. Ici encore, la stratégie peut être individuelle : on ajoute le nom d’une personne dont on apprécie les qualités ou que l’on suppose ouverte à des compromis avec son propre camp politique. Mais elle peut aussi être partisane : on pourrait imaginer que des électrices et électeurs socialistes ou verts décident de favoriser, au sein de la liste « Ensemble à gauche et Union populaire », l’une des deux tendances de cette liste, ce qui pourrait renforcer ou contrecarrer l’éventuelle logique partisane des personnes qui auront choisi cette liste. L’hypothèse est sans doute plus théorique en ce qui concerne la liste « Le Centre – Les Vert’libéraux ».

On concluera en soulignant que le système proportionnel utilisé en Suisse, à tous les niveaux, laisse une très grande flexibilité aux électrices et électeurs. Celles et ceux qui en maîtrisent les subtilités peuvent ainsi maximiser l’efficacité de leur vote.